BRÉSIL, LE RECYCLAGE À DEUX VITESSES

 « A l’occasion de la journée mondiale du recyclage, le 18 mars prochain, nous vous proposons de découvrir comment cela se passe dans trois pays différents. Après le Japon et avant le Canada, gros plan sur le Brésil. »
 

Au niveau mondial, depuis plusieurs années, le Brésil est le champion incontesté du recyclage de canettes. Mais ce statut de leader cache une vérité moins reluisante : moins de 5% des déchets produits dans le pays sont recyclés. Un secteur qui repose encore beaucoup sur des travailleurs et des installations informels.

 ‘BRÉSIL, GROS PRODUCTEUR DE DÉCHETS’

Le Brésil consomme comme un pays riche, mais recycle encore comme un pays émergent. Pour les experts, c’est ce constat qui résume le mieux la situation de ce pays d’Amérique latine qui compte 210 millions d’habitants.

« LE BRÉSIL CONSOMME COMME UN PAYS RICHE, MAIS RECYCLE ENCORE COMME UN PAYS EMERGENT »

Chaque année, un Brésilien produit 385kgs de déchets en moyenne. En tout, cela fait 78 millions de tonnes d’ordures ménagères en tous genres, dans tout le pays. Les déchets électroniques constituent également une grande partie des déchets qui se retrouvent dans la rue (ordinateurs, télévisions, imprimantes, batteries…)

Une surproduction qui en fait le 4ème pays au monde en termes de production de déchets.

Des chiffres dus notamment au boom économique et démographique ainsi qu’à l’accès des couches défavorisées aux produits de consommation.

 ‘DES POLITIQUES DIFFICILES À METTRE EN OEUVRE’

Le Brésil essaie de placer l’environnement au cœur des priorités depuis les années 70, mais la législation en termes de recyclage est toute récente. Ce n’est qu’en 2010 que le pays a adopté des mesures pour le tri sélectif et le traitement des déchets.

Malgré cela, la réalité sur le terrain reste compliquée. Seuls 15% de la population a accès au recyclage, 9% ne bénéficie même pas d’une collecte régulière et très peu d’habitants respectent les procédures de tri sélectif.

La plupart des villes ne disposent pas d’installations officielles pour le tri et le traitement des ordures. Et 41% des déchets urbains finissent dans des décharges sauvages, en grande partie responsables de la pollution des sols et des eaux dans le pays.

Des centres de traitement et des incinérateurs modernes ont vu le jour mais restent insuffisants pour faire face à la quantité importante d’ordures.

 ‘TROUVER LES MOYENS D&#39ATTEINDRE LES OBJECTIFS FIXÉS’

Juste après l’adoption de la loi de 2012, le recyclage au Brésil a connu une progression importante qui n’a malheureusement pas duré longtemps.

Aujourd’hui, la courbe stagne. Et les experts identifient deux raisons principales :

– Le manque de moyens : En 2012, le pays s’était donné deux ans pour faire disparaître les décharges sauvages. Un délai qui a été repoussé à 2018. Aujourd’hui, les municipalités dénoncent des fonds insuffisants pour la construction et le fonctionnement de nouveaux centres de traitement. Elles estiment très difficile de mettre en place une collecte sélective structurée, surtout dans l’arrière-pays où 55% des villes n’ont aucune initiative en ce sens.

– Le manque d’implication de la population : La plupart des habitants jettent leurs ordures sans trier, même si les études montrent que la majorité a conscience de l’importance de ces gestes pour l’environnement.

Selon la loi, les industriels sont censés s’assurer que les déchets qu’ils génèrent sont manipulés correctement. Or, très peu respectent les procédures. Pour essayer de changer les mentalités, le gouvernement étudie la piste de mesures incitatives : Des réductions sur les factures d’énergie pour les ménages qui trient leurs déchets, des subventions pour les entreprises. Des campagnes de sensibilisation sont également organisées, notamment dans les écoles pour changer les comportements dès le plus jeune âge.

Le recyclage des canettes au Brésil, une spécialité

‘LE RECYCLAGE DES CANETTES, LA RÉUSSITE BRÉSILIENNE’

Chaque année, le Brésil recycle 50% du papier consommé. Mais le chiffre dont les Brésiliens sont vraiment fiers est celui ci : 98% de canettes en aluminium recyclées.

Un record qui porte sur près de 300 mille tonnes de canettes. (En comparaison, l’Europe affiche une moyenne de recyclage de 67%). (Sources : Agence France Presse et Association brésilienne de fabricants de canettes)

Les canettes recyclées sont réutilisées par les industriels. Ce qui permet également de réinjecter 192 millions d’euros dans l’économie nationale.

Un succès qui repose entièrement sur un système informel typique du Brésil.

‘LES CATADORES, FOURMIS TRAVAILLEUSES DU RECYCLAGE BRÉSILIEN’

Ils sont 600 mille, sans doute beaucoup plus. Des hommes, des femmes, jeunes ou âgés, tous issus des milieux défavorisés. Surnommés les Catadores, ils sillonnent les rues des villes avec des chariots dans lesquels ils collectent les déchets. Certains vivent parfois directement dans les décharges et prélèvent directement les matériaux qu’ils peuvent revendre créant ainsi leur propre système de tri et de recyclage. Ils sont responsables de 90% du recyclage dans le pays.

Les Catadores gèrent des kilos et des kilos de cartons, verre, plastique … Et surtout, des canettes.

Il faut 74 canettes pour faire un kilo d’aluminium, lequel vaut, selon les fluctuations du marché, entre 50 et 70 centimes d’euros.

Grâce à cette activité, les Catadores s’assurent un salaire minimum de 241 euros. Cependant, ils ne bénéficient d’aucune protection sociale et travaillent dans des conditions sanitaires très difficiles.
Conscient de l’importance des Catadores, les pouvoirs publics financent des projets de coopératives pour que la profession soit plus structurée.

Des applications existent également, sur le même modèle que celle de chauffeurs privés, afin de mettre en contact des habitants et des Catadores. Ces derniers peuvent ainsi récupérer directement les déchets recyclables auprès des particuliers.

Malgré les retards enregistrés par le Brésil, il semble qu’une partie de la population commence à prendre conscience de l’impact sur l’environnement. Des initiatives locales voient le jour, comme des restaurants qui transforment leurs déchets en compost, … Des projets que les autorités se disent prêtes à soutenir financièrement.

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